« Tout ce qui fait avancer les femmes fait avancer la société » – Gisèle Halimi
La Loi Veil a ouvert la voie à un cadre légal protégeant les droits reproductifs des femmes. Ils sont le résultat de la lutte du mouvement féministe, du combat de femmes engagées pour leur autodétermination : de la défense de Gisèle Halimi lors du procès de Bobigny en 1973 aux actions du MLF – le Mouvement de Libération de la Femme.
Depuis toujours, les femmes ont avorté. Les femmes et médecins qui les aidaient furent longtemps jugés et incriminés. Cette répression atteignait son apogée sous le régime de Vichy, lorsque l’avortement fut considéré comme un « crime d’Etat » et passible de la peine de mort. A l’heure où l’extrême-droite est aux portes du pouvoir, nous devons nous rappeler de cette histoire.
Ce droit demeure fragile et dans les crises politiques, le corps des femmes et leurs droits deviennent de nouveau sujet de possession et de contrôle.
Le combat se poursuit donc aujourd’hui encore. Au niveau national comme international, des mouvements de droite, d’extrême-droite et des mouvements religieux conservateurs remettent en cause le droit à l’avortement. Certains pays connaissent d’ores-et-déjà des reculs majeurs, comme aux Etats-Unis, au détriment des droits des femmes, de leur santé et celle de leurs enfants. Enfin, malgré l’inscription du droit à l’IVG dans la Constitution en 2024 en France, des freins à l’avortement et des inégalités d’accès persistent. Il est nécessaire de continuer à défendre ce droit et garantir l’accès à toutes à l’IVG.
L’IVG en quelques dates
1942 : l’avortement est considéré comme un « crime d’Etat » par le régime d’extrême-droite de Vichy et est passible de la peine de mort
1972 : lors du « Procès de Bobigny », Gisèle Halimi démontre l’injustice de la législation en vigueur en France
1975 : adoption de la loi légalisant l’IVG pour une période « d’essai » de 5 ans
1979 : pérennisation de la loi
1982 : prise en charge de l’IVG par la Sécurité sociale
2001 : extension du délai légal de 10 à 12 semaines de grossesse
2022 : extension du délai légal de 12 à 14 semaines de grossesse
2024 : sous l’impulsion des parlementaires LFI, inscription du droit à l’IVG dans la Constitution française
11 OCTOBRE 1972 : Marie-Claire Chevalier est acquittée lors du procès de Bobigny
Pour avoir avorté après avoir été violée, elle encourait la peine de 5 ans de prison. Sa mère risquait quant à elle 10 ans d’emprisonnement pour l’avoir aidé. Son avocate, Gisèle Halimi, devient alors une des figures majeures du combat pour la légalisation de l’IVG.
26 NOVEMBRE 1974 : Simone Veil défend l’IVG à l’Assemblée nationale
À seulement 16 ans, Simone Jacob, de famille juive fut déportée avec sa sœur et sa mère dans un camp de concentration, où cette dernière perdit la vie. Simone et sa sœur en reviendront vivantes. Nommée ministre de la Santé en 1974 sous la présidence de Valéry Giscard d’Estaing, Simone Veil prend en charge un projet de loi sur l’interruption volontaire de grossesse (IVG).
Malgré les vives oppositions, elle parvient à faire adopter la loi le 17 janvier 1975, offrant aux femmes le droit d’avorter sans être criminalisées.
Le 18 mars 2010, Simone Veil fait son entrée solennelle à l’Académie française, lors d’une cérémonie marquée par la présence de trois présidents de la République : Nicolas Sarkozy, Jacques Chirac et Valéry Giscard d’Estaing. Cet événement symbolique fut perturbé par des manifestations d’opposants à l’IVG.
4 MARS 2024 : Inscription du droit à l’IVG dans la constitution
« Ce 4 mars 2024, la France renoue avec sa vocation de phare des droits humains » – Mathilde Panot
« La République française, désormais, ne sera plus jamais la République sans le droit à l’avortement » – Mélanie Vogel
A la suite d’un long parcours législatif, enclenché par les parlementaires insoumis et poursuivi par les sénateurs écologistes, la France constitutionnalise le droit à l’IVG. Plusieurs ministres actuels se sont opposés à la constitutionnalisation de l’IVG quand ils étaient parlementaires : Bruno Retailleau (il estime l’inscription de l’IVG dans la Constitution « superfétatoire »).
LE COMBAT CONTINUE, A L’INTERNATIONAL COMME EN FRANCE !
Dans les pays où l’extrême-droite est au pouvoir, les droits des femmes au premier rang desquels le droit à l’IVG est attaqué, voire supprimé.
A cause des nominations préalables de Trump, le 24 juin 2022, la Cour suprême des États-Unis a annulé l’arrêt fédéral, Roe vs Wade, qui protégeait le droit à l’avortement depuis 1973. Dans 14 États, l’avortement était devenu illégal, notamment dans le Texas, Mississippi ou Alabama. Au Texas, même un viol ou un rapport incestueux ne constitue pas une exception.
En Pologne, sous l’impulsion du gouvernement d’extrême-droite au pouvoir, le droit à l’IVG a été restreint drastiquement en 2020.
En Italie, bien que légale, l’accès à l’IVG est quasi-impossible : selon un rapport publié en 2021 par le ministère de la Santé italien, 67 % des gynécologues ont, en 2019, refusé de pratiquer l’IVG au nom de la clause de conscience. Ce chiffre monte même à 80 % dans 5 des 20 régions italiennes. En avril 2024, un amendement porté par le parti de Georgia Meloni visant à autoriser l’accès aux centres de conseil – par lesquels les femmes enceintes doivent passer pour avorter – aux groupes anti-avortement a été adopté. Cela préfigure d’un durcissement de l’accès à l’avortement.
En France, si le droit à l’IVG a été constitutionnalisé, son accès demeure trop inégalitaire aujourd’hui.
- Le manque de structures et les délais d’attente trop longs : plus de la moitié des femmes interrogées ont dû patienter plus de sept jours pour avoir un rendez-vous pour leur interruption volontaire de grossesse, au lieu des cinq jours recommandés par l’OMS.
- La persistance d’une stigmatisation : 63 % des femmes ayant avorté déclarent avoir eu peur d’être jugées par les professionnels de santé ou leur entourage. 1 femme sur 3 a ressenti des pressions. Ce sont le plus souvent des pressions lors de l’avortement de la part des mouvements anti-choix, de certains soignants ou de leur entourage.
- Les inégalités face à l’avortement : les femmes qui vivent en zones rurales et les immigrées, notamment sans-papiers, éprouvent davantage de difficulté pour accéder à l’IVG
A lire :
L’IVG dans la Constitution
Planning Familial de Gironde : tonplanatoi.fr