Nous sommes 256 député.e.s de divers groupes politiques à avoir co-signés cette proposition de loi, permettant de mieux lutter contre la désertification médicale.
Discutée en commission il y a quelques jours, elle avait malheureusement été amputée de sa mesure la plus importante : la régulation de l’installation des médecins. Nous sommes parvenus à réintroduire cette mesure lors de l’examen de la loi en séance.
87% du territoire est un désert médical …
La désertification médicale en France est un problème croissant qui fragilise l’accès aux soins pour de nombreux citoyens. Le vieillissement de la population médicale, combiné à des politiques publiques insuffisantes, a mené à une diminution du nombre de médecins dans plusieurs régions, créant des inégalités flagrantes entre les territoires. La situation est particulièrement préoccupante dans les zones sous‑denses où les délais d’attente pour consulter des spécialistes sont de plus en plus longs, atteignant parfois plusieurs mois.
Depuis plusieurs décennies, des mesures d’incitation à l’installation des médecins dans les zones déficitaires ont été mises en place, telles que le financement d’assistants médicaux ou le passage à un numerus apertus pour la formation des médecins. Cependant, ces dispositifs sont insuffisants, ils ne garantissent pas une réelle amélioration à long terme de la distribution des médecins. Les facteurs personnels, comme l’attachement territorial ou les conditions de travail, jouent un rôle majeur dans le choix des médecins de s’installer, rendant les incitations financières moins efficaces.
Pour remédier à cette crise, des propositions de régulation de l’installation des médecins ont été avancées. Des exemples étrangers, tel que l’Allemagne, montrent qu’une telle régulation peut conduire à une meilleure répartition géographique des médecins.
Cette loi se propose de lutter contre les déserts médicaux et de faciliter l’accès aux soins par plusieurs leviers :
Un droit d’installation sera octroyé dans les zones qui connaissent un déficit de soignants, mais dans les territoires mieux pourvus, le médecin ne pourra s’installer que lorsqu’un autre s’en va. Cette contrainte ne concernera que 13% du territoire, laissant parfaitement libres les médecins de s’installer sur les 87% restants !
Cette situation d’absence de médecin traitant désigné concerne près de 6 millions de français.es, une double peine qu’il fallait résoudre au plus vite.
Cette formation, comme cela est déjà le cas dans de nombreux établissements, peut être dispensée en partie en distanciel. Le déploiement d’une offre de formation en santé sur l’ensemble du territoire suppose également un accompagnement renforcé des étudiants.
Cette permanence des soins ou “obligation de garde” existait jusqu’en 2002 : elle fut supprimée par la droite à la demande des collectifs de médecins libéraux. Les hospitaliers demandent son rétablissement, ce qui nourrit un conflit avec les libéraux et les cliniques. Les établissements privés sont soumis aux mêmes obligations de permanence des soins que l’hôpital public, mais les cliniques ne les respectent pas (ou très inégalement).
Aujourd’hui, l’hôpital public en assure 85%, du côté des médecins libéraux, le désengagement est aussi très net : ils ne sont que 39,34% de médecins volontaires à participer à la permanence des soins ambulatoires (PDSA). De fait, les patients sont contraints de se tourner vers l’hôpital public pour accéder aux soins.
Un médecin tend à être de permanence toutes les 4 à 6 semaines. Ce serait 3 fois plus espacé si tous y participaient, répartissant ainsi les efforts !
Nos propositions pour lutter contre les déserts médicaux et permettre l’accès aux soins :
Cette proposition de loi est une première étape vers la reconstruction de notre système de santé sur l’ensemble du territoire. Nous proposons d’autres solutions pour compléter ce premier projet de loi :
➔ Reconstruire le service public hospitalier et instaurer le « 100 % Sécu » en remboursant à 100 % les soins de santé prescrits et en intégrant les mutuelles dans la Sécurité sociale
➔ Engager un plan pluriannuel de recrutement des professionnels du soin et du médico-social (médecins, infirmiers, aides-soignants et personnels administratifs), revaloriser les métiers, les salaires et la tarification de certains actes libéraux des infirmiers
➔ Réouvrir progressivement des services d’urgences, de maternités et des EHPAD publics assurant un service de santé public de proximité à moins de trente minutes de chaque Français
➔ Créer un réseau public de centres de santé pluridisciplinaires ou communautaires et de coopératives médicales en lien avec des infirmiers référents et déployer de manière effective le statut d’infirmier de famille
➔ Financer l’augmentation du nombre de places en faculté de médecine en partant des besoins et la création d’écoles normales de santé dans les territoires
➔ Réguler l’installation des médecins et généraliser les guichets uniques pour toutes les démarches d’installation des soignants
➔ Éradiquer d’urgence la précarité administrative, sociale et statutaire dans laquelle sont maintenus les praticiens diplômés hors Union européenne et leur permettre d’exercer de manière pérenne en France
Voir la proposition de loi : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/textes/l17b0682_proposition-loi