Finances 🏛 À l'Assemblée Nationale

« Prendre aux pauvres pour donner aux riches », cette politique budgétaire à censurer sans hésitation

Publié le : 5 février 2025 | Mis à jour le : 24 février 2025

Le 3 février dernier, je m’étais inscrite pour intervenir à la tribune de l’hémicycle, afin de porter la position du groupe LFI-NFP sur le budget de Bayrou, à l’issue de la commission mixte paritaire. Nous nous opposions bien entendu à ce budget de casse sociale, d’austérité pour nos services publics et aveugle à la justice fiscale. Prendre aux pauvres pour donner aux riches, l’adage a rarement mieux résumé la politique économique macroniste qui, malgré les résultats des urnes en juillet dernier, continue de s’exercer dans notre pays.

Je n’ai finalement pas pu donner l’avis de notre groupe, car le premier ministre a rapidement dégainé le 49.3, pour interrompre les débats à l’Assemblée et faire passer en force son budget de malheur. Je reproduis ici ce discours – jamais prononcé – car il permet de comprendre à la fois pourquoi selon nous il fallait voter contre ce budget, et pourquoi en l’absence de vote à cause du 49.3, il était impératif de voter la censure.

Déclaration Générale – Budget 2025 – 03/03/2025

« Nous voici réunis 3 jours après que la commission mixte paritaire a adopté à une courte majorité, un accord sur le projet de loi de finances pour 2025. Cette CMP n’a pas modifié les grands équilibres issus du Sénat et a donc produit le budget le plus austéritaire depuis 25 ans. Nous sommes bloqués dans une histoire sans fin. Monsieur le premier ministre, vous avez décidé de reprendre le même budget que votre prédécesseur, alors même qu’il avait pavé la route vers sa censure. Le budget Barnier, en aggravant la politique économique macroniste par une bonne dose d’austérité, allait conduire à la récession et au saccage de nos services publics. Qu’avez-vous retenu de la censure, depuis ? A peu près rien, puisque vous scénarisez la même pièce de théâtre minable, avec souvent les mêmes ministres, ou devrais-je dire, les mêmes acteurs.

Depuis 8 mois, les députés du NFP portent dans cette assemblée la volonté d’une grande partie du peuple français de doter notre pays d’un budget de justice sociale et écologique, source de tolérance et de paix.

Cela fait 8 mois que les Françaises et les Français attendent les résultats d’un vote auquel ils ont massivement participé et par lequel ils ont clairement choisi de rompre avec la trajectoire proposée par un président qui les a dupés.

Cela fait désormais 8 mois que le président de la République, désinvolte et arrogant, se joue de la vie des Françaises et des Français. 8 mois que l’on assiste à une valse de ministres toujours plus sourds aux attentes d’un peuple qui souffre.
Que de temps perdu depuis le 7 juillet. Et pour asseoir votre imposture, vous n’hésitez pas à utiliser le mensonge, le chantage et la diffamation.

Vous, les ministres de la République, vous avez sciemment choisi de diviser les français en diabolisant la censure à outrance et en racontant n’importe quoi sur les plateaux de télévision, jusqu’à la carte vitale qui allait s’arrêter de fonctionner. Or toutes les personnes de bonne foi savent que ce n’est pas la censure qui a créé l’instabilité, mais bien la dissolution suivie du non-respect du vote des citoyens.

La censure est la réponse constitutionnelle logique et légitime à l’utilisation de l’article 49-3. Elle permet l’expression de l’opposition. Et le législateur a tout prévu pour que les institutions continuent de fonctionner normalement.

Vous prétendez que la France n’a pas de budget. C’est faux. La France a un budget, de par la loi spéciale adoptée le 18 décembre, qui permet l’ouverture de crédits dans la limite de ce que prévoyait la loi de finances pour 2024. Et cette situation n’est ni inédite, ni nécessairement périlleuse puisqu’à côté de nous, l’Espagne qui reconduit le même budget depuis 2023, réussit la croissance la plus élevée d’Europe.

Il serait donc « responsable » de cesser de dramatiser, de cesser de faire peur aux français et de cesser de mettre en cause la souveraineté parlementaire.

Votre budget n’est pas une fatalité et ce ne sont pas vos opérations honteuses comme le chantage sur les services civiques ou le Pass Culture, qui vont convaincre qui que ce soit.

Vous allez imposer un budget qui ne permet pas le déploiement des moyens urgemment nécessaires au bon fonctionnement de nos services publics : comment enrayer les dysfonctionnements majeurs de la poste, la dégradation des bâtiments scolaires vieillissants, des casernes de gendarmes, le manque dramatique de médecins dans nos villes, dans nos villages et dans nos hôpitaux, les conditions de travail délétères des enseignants et des soignants en procédant à des coupes inédites sur toutes ces missions ?

Votre budget abandonne aussi les TPE/PME, les exploitants, les salariés et les ouvriers agricoles ainsi qu’une grande part des structures de l’économie sociale et solidaire à leur sort. Comment restructurer, créer et organiser des filières, verser des aides directes à celles et ceux qui en ont le plus besoin avec 23,5 milliards de coupes dans les dépenses ?

Et que dire de la mission écologie, qui se voit amputée presque 3 milliards par rapport à la loi de finances 2024, dont les crédits étaient déjà notoirement insuffisants ?

Et pourtant de l’argent il y en a et il y a même possibilité de dégager des majorités à l’Assemblée pour aller le chercher, comme nous l’avons démontré lors de l’examen de la partie recettes du PLF. Par de simples mesures de justice fiscale ambitieuses et surtout pérennes de façon à permettre la planification de nos politiques publiques sur le long terme.

Et il ne s’agit pas d’aller taxer les classes moyennes et les PME/TPE comme vous aimez à le clamer. Il s’agit par exemple de l’impôt Zucman qui vise à assurer une imposition minimale  de 2 % pour les multimillionnaires. Cette contribution plancher générerait au moins 15 milliards de recettes supplémentaires dans le budget de l’État, selon l’économiste Gabriel Zucman.

Malgré toutes ces évidences, vous choisissez d’amplifier la politique économique qui nous a conduits à la crise actuelle. L’histoire sans fin se poursuit, car vous demeurez sourd à la volonté populaire. Mais il y a pire… Car vous êtes moins sourd en revanche aux aspirations xénophobes et racistes, au fantasme du « grand remplacement » de l’extrême droite. Pour tenter de masquer que votre projet consiste à taxer les pauvres afin de gaver les riches, vous avez usé des mêmes procédés détestables en parlant de « submersion », en osant dire que les préjugés étaient -je cite- « fondés sur le réel », en vous attaquant à l’aide médicale d’état.

Monsieur le premier ministre, rien ne va dans votre budget qui va aggraver le malheur de millions de français. Vous ne connaissez plus rien du peuple que vous prétendez gouverner.
Siéger dans un conseil municipal ne suffit pas à garder le contact avec les Françaises et les Français, quand on traverse Paris avec des chauffeurs et la France en Falcon.

A tous mes collègues présents ici, je voudrais dire que la gauche ne peut pas se cacher derrière le mensonge de l’absence de budget pour ne pas censurer un gouvernement qui marque son allégeance décomplexée à l’extrême droite.

Votons la censure qui vient sans l’ombre d’une hésitation. »


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